Surfer enceinte, le rêve !

Posted: November 17, 2020 by Clémentine

J’aurais aimé vous dire que le titre de cet article reflète la pure réalité, mais je suis au regret de vous annoncer que son contenu est complètement faux. 

A l’heure où Kelia Moniz a.k.a la Queen du longboard nous envoie du rêve à coup de gros bidon surplombant un hang ten parfaitement exécuté, on voit au nombre de cœurs sous ses photos que l’image fait rêver bon nombre de futurs parents, et même ceux qui n’ont aucune envie d’enfanter. L’aura de la femme enceinte associée à la grâce du longboard est un vecteur inépuisable de like sous les posts Instagram. Pourtant ces images de rêve furent on ne peut plus éloignées de ma réalité de surfeuse qui traine son néoprène à l’eau depuis 20 ans. C’est bien pour ça que j’en parle ici : envoyer du rêve sur les réseaux c’est bien, dire la vérité ça fait aussi du bien à celles qui sont scotchées sur leur canap’.

Du rêve à la réalité

A peine rassurée sur l’évolution de ma grossesse, je me rêvais déjà à l’eau caressant mon ventre, partageant des moments uniques et inoubliables avec un petit être surfant de son côté dans du liquide amniotique, et continuer ainsi jusqu’à ce que la circonférence de mon ventre m’empêche de voir la wax sur ma planche.

La réalité fut bien différente de ces douces projections mentales : entre les nausées et la grande fatigue du premier trimestre, et les contraintes médicales des deux autres, mes orteils n’ont que très peu eu l’occasion de fouler l’eau salée. Déjà parce qu’étant pratiquante de shortboard, le surf ne m’a pas paru du tout adapté, ou confortable en cette période, notamment à cause de la position obligatoirement allongée à la rame. Changer de support? Oui bien évidement, c’est une bonne idée et j’ai donc surfé, une fois ou deux, un gros fish stable. Je n’ai toutefois pas opté pour le longboard, que je maitrise moins, car j’avais peur de tomber sur ma planche.

Il faut aussi prendre en compte la période à laquelle on tombe enceinte : en effet, surfer un Waikiki Beach de 80 cm ou un Seignosse gentil des mois d’été, c’est sympa, ludique, et super pour se dépenser un peu. Se ramasser les swells d’automne qui gagnent en puissance c’est tout de suite une autre paire de manches avec un pamplemousse/melon/pastèque qui fait des pogos dans votre ventre. Alors bien sur il y a toujours les exceptions : les filles qui shootent du solide jusqu’à 6 mois, celles qui n’ont peur de rien ou qui sont tout simplement en grande forme jusqu’au terme.

Pour ma part, j’ai bien surfé quelques fois enceinte, au tout début de l’automne. Puis mon corps s’est vite mis en mode veille, alors le surf était bien éloigné de mes préoccupations quotidiennes.

Surfer la vie oui, mais pas de surf en attendant de donner la vie

Le second trimestre et le retour de la forme tant attendu sont arrivés, et même si c’était l’hiver, j’étais plutôt motivée pour aller faire trempette. Un petit séjour au Portugal était même prévu à cet effet, malheureusement les conditions n’ont pas été au rendez-vous, et je n’ai sorti la board qu’une ou deux fois, entre quelques sessions de body(belly)surf. A cela est venue s’ajouter la trouille de se prendre sa planche, ou celle de quelqu’un d’autre, dans le ventre. En pratique c’est peu fréquent, mais c’est comme quand on s’est cassé un petit orteil, c’est toujours celui-ci qu’on va se cogner dans le pied de la table basse…

Le reste de l’épopée de la grossesse m’a complètement interdit le surf, puisque je n’ai même plus eu le droit de marcher : on est donc bien à des années lumière de Bethany (Hamilton), Kelia et consœurs qui surfent jusqu’à la veille de mettre au monde leur progéniture. Pourtant malgré les nombreux rebondissements plus ou moins agréables qui ont jalonné cette folle expérience, j’ai pu surfer à ma façon. Non pas dans l’eau salée, mais au gré des situations inattendues qui se sont enchainées, comme lorsqu’on est pris par une série sortie de nul part, lors d’une grosse houle hivernale : observer, respirer, patienter, et savoir qu’après la série qui nous malmène, le calme revient.

Même si mon expérience n’a pas été concluante surfistiquement parlant, je reste admirative des future mamans qui continuent de surfer. Pouvoir continuer de faire ce qu’on aime durant cette période où tout change doit être exaltant. Les quelques clichés que j’ai pu voir passer font aussi de jolis souvenirs, moins culcul la praline que les sessions photos mains sur le ventre au coucher du soleil (désolée pour celles qui pensent à leur album photo “pregnancy shoot” dans l’étagère du salon). Je reste cependant un peu méfiante face à l’image hyper accessible véhiculée. Le surf Instagram, enceinte ou pas, ça reste le surf d’Instagram: ce n’est pas du surf mais une image de rêve à un instant T.

Le surf Intagram, enceinte ou pas, ça reste le surf d’Instagram: ce n’est pas du surf mais une image de rêve à un instant T

Après bien évidemment, cela reste une affaire personnelle : personne ne devrait avoir son mot à dire, ni les bien pensants, ni les haters, ni les autres femmes enceintes ou celles qui l’ont été. C’est un choix personnel, et la seule concernée est la femme enceinte. Le seul conseil qui sera dispensé ici est le suivant : durant cette période de la vie si particulière, si vous ne le sentez pas, ne le faites pas. La femme enceinte ne revêt peut être pas tous les mythes qu’on veut lui prêter, mais elle a deux particularités : un instinct qui ne trompe pas, et une envie de faire pipi incessante.

Quelques indications si vous hésitez à aller à l’eau :

  1. N’allez à l’eau que si vous maîtrisez votre environnement, ce n’est pas le moment de tester le slab du coin si vous ne l’avez jamais surfé,
  2. Préférez un support plus stable, avec du volume pour moins se fatiguer à la rame et avoir plus de temps au take off,
  3. Evitez au maximum l’apnée et essayer de garder un rythme tranquille,
  4. Soyez sélectives, et préférez les petites vagues,
  5. Préférez les spots peu ou moyennement fréquenté pour éviter tout accident, même si les vagues sont moins biens !
  6. Essayer d’aller à l’eau avec une connaissance qui gardera un œil sur vous et pourra vous aider en cas de problème,
  7. Surfez en douceur, pas de wipe-outs violents, de late take-off ou de kick-outs expéditifs pour limiter les impacts sur votre corps,
  8. Limitez la durée de votre session pour reposer votre corps. 30-40 minutes est une bonne moyenne,
  9. Ramez sur les genoux éventuellement si le support le permet,
  10. Au moindre inconfort, sensation bizarre, douleur, sortez et consultez si vous jugez que c’est nécessaire.

Bon surf!

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Quelques liens pour se renseigner sur l’activité physique et la grossesse : 

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